Une première mondiale pour les cancers avancés de la prostate
Par Dalila Benhaberou-Brun
Les statistiques sont affligeantes : Au Canada, le cancer de la prostate touche quelque 25 000 hommes et un sur six n’y survivra pas. En effet, 4300 hommes meurent chaque année de cette maladie dans d’atroces douleurs, une réalité qui alarme le Dr.Fred Saad, chirurgien en urologie et chercheur au CRCHUM
CAS DÉSESPÉRÉS
Parmi les cancers de la prostate détectés chaque année, certains évoluent à un stade avancé. Le traitement habituel pour ce type de cancer consiste à donner des hormones. Même si cette prise en charge s’avère efficace dans la majorité des cas, il n’en demeure pas moins qu’une partie des hommes atteints deviendront résistants au traitement et auront des métastases. Dans ces cas, il existe des traitements qui peuvent aider, mais, quand il n’y a pas de métastases, il n’y a aucune thérapie. La seule chose à faire est « d’attendre que les métastases atteignent les os », explique le Dr Saad. Selon les facteurs de risque, les métastases peuvent apparaître dans les 12 à 24 mois et la fin devient vite inéluctable.
DE L’OSTÉOPOROSE VERS LE CANCER
Depuis plusieurs années, toutes les tentatives pour agir sur l’apparition des métastases ont échoué, regrette Fred Saad. Cinq projets majeurs ont été menés dans le monde, mais en vain. Finalement, c’est un médicament qui avait démontré une efficacité pour traiter l’ostéoporose, et aussi les métastases qui s’est révélé être une piste intéressante : le denosumab. Ce médicament avait démontré un effet
concluant dans l’ostéoporose, notamment pour prévenir les fractures. « Il nous a semblé évident d’utiliser ses propriétés pour protéger, et même renforcer les os pour les cas de cancers de la prostate qui ne répondent plus au traitement hormonal ».
UN PROTOCOLE NOVATEUR
Quelque 1 432 hommes souffrant de cancer avancé de la prostate ont reçu soit le denosumab à raison d’une injection par mois, soit un placebo. L’objectif était de vérifier si le denosumab pouvait retarder l’apparition des métastases osseuses. Le suivi s’est fait principalement par radiographie.
Et pour la première fois, dans le groupe des hommes qui recevaient le médicament, les métastases ont pu être retardées de façon significative par rapport à l’autre groupe ! « C’est sensationnel qu’on arrive à un tel résultat après tous les échecs passés », déclare Fred Saad, enthousiaste. D’ailleurs, les résultats de cette étude unique au monde seront présentés prochainement dans des congrès internationaux par le Dr Fred Saad et le Dr Matthew Smith, de l’Université Harvard.
DU DÉSESPOIR À L’ESPOIR
Ces résultats auront un impact majeur dans le monde, car ce médicament permet enfin de retarder le moment de l’apparition des métastases osseuses, mais également de maîtriser la douleur intense qui accompagne la maladie. La recherche continue pour cibler les patients à risque de métastases et pour établir la meilleure stratégie d’utilisation de cette nouvelle arme thérapeutique. Le denosumab n’est toutefois pas encore disponible au Canada. Plusieurs étapes devront être franchies et le Dr Saad est heureux de pouvoir redonner une lueur d’espoir à ses patients.