Indications de la TEP-TDM au 18F-FDG dans l’investigation des nodules pulmonaires

Michel Tessier, MD, MSc, FRCPC,

Chef du Service de Médecine Nucléaire de l'Institut Universitaire de Cardiologie et de Pneumologie de Québec Chargé d'enseignement clinique, Université Laval

Introduction

Les nodules pulmonaires sont de petites opacités radiographiques focales et arrondies, solitaires ou multiples, caractérisés par leur nombre, taille et densité. Le nodule solitaire classique est défini comme une opacité unique de 30 mm ou moins, bien délimitée, entourée de parenchyme pulmonaire normal, sans évidence d’atélectasie ou d’épanchement pleural associé. Il s’agit souvent d’une découverte fortuite sur une radiographie pulmonaire simple ou une tomodensitométrie (TDM) du thorax chez des patients asymptomatiques. Les lésions pulmonaires faisant plus de 30 mm sont appelées masses et sont considérées suspectes de cancer jusqu’à preuve du contraire.

Sont exclus de cet article les nodules dits multiples ou diffus, arbitrairement définis comme > 10. Ces derniers sont souvent accompagnés de symptômes et correspondent soit à des métastases d’un cancer extra-thoracique ou à un processus inflammatoire ou infectieux. Cependant, la notion de nodule solitaire doit maintenant inclure le nodule dominant associé à un ou plusieurs nodules plus petits, tel que fréquemment observé sur la TDM thoracique.

Deux autres distinctions sont importantes. Les petits nodules infracentimétriques (< 8 mm) sont plus difficiles à investiguer tant par les différents examens d’imagerie que par biopsie non chirurgicale et leur taux de malignité est généralement moins élevé. Sur la TDM, on reconnaît  selon leur densité des nodules solides et non solides, ces derniers étant subdivisés en deux sous-catégories soit les nodules en « verre dépoli » pur et les nodules mixtes dont, une portion est solide.

Étiologie

Plus de 150,000 nouveaux nodules pulmonaires sont investigués chaque année en Amérique du Nord. Ils sont d’étiologies diverses, incluant plusieurs maladies bénignes, mais de 30 à 50 % sont malins, et il s’agit fréquemment de la présentation initiale d’un cancer pulmonaire. Comme le pronostic s’aggrave avec la dimension des lésions et un stade plus avancé, il est impératif d’identifier le plus rapidement possible les nodules malins destinés à une résection chirurgicale, tout en évitant les chirurgies inutiles aux patients qui ont une maladie bénigne. Le diagnostic différentiel des nodules pulmonaires est détaillé au tableau 1.

Principe de la TEP-TDM

La TEP-TDM (PET-CT) est une technique d’imagerie hybride ayant recours à un tomographe d’émission couplé à un tomodensitomètre, ce qui permet d’obtenir simultanément une information anatomique et fonctionnelle à haute valeur diagnostique. Tout comme lors des examens de médecine nucléaire conventionnels, les images sont obtenues après injection d’un radiotraceur, en l’occurrence du fluorodésoxyglucose marqué au fluor-18 (18F-FDG) pour l’indication discutée. Depuis son introduction pour la détection clinique du cancer il y a environ 20 ans, ce radiotraceur demeure le plus fréquemment utilisé à cet effet. C’est un analogue du glucose qui est transporté activement puis séquestré à l’intérieur des cellules, où son accumulation permet la mise en image. En vertu de plusieurs altérations structurales et métaboliques qui les caractérisent, les cellules tumorales captent et accumulent le 18F-FDG à des taux supérieurs comparativement aux tissus adjacents, ce qui en fait un agent de choix pour la détection de plusieurs types de cancers.

Pour les études oncologiques, les patients doivent être à jeun six heures avant l’examen, et la glycémie inférieure à 7 mmol/l. On procède à l’injection du radiotraceur et des coupes tomographiques sont réalisées de la base du crâne jusqu’au bassin environ une heure plus tard. La durée totale est de 1h30 à 2h00. Les images sont interprétées de façon qualitative mais une mesure semi-quantitative de la captation (SUV) au sein des lésions est également utilisée pour référence.

Indications

Pour la détection des nodules pulmonaires néoplasiques, la TEP-TDM a une sensibilité d’environ 95 % et une spécificité supérieure à 80%. Toutefois, la sensibilité est moindre pour les nodules < 8 mm, alors que les nodules inférieurs à 5 mm sont habituellement non caractérisables. La prévalence de malignité est corrélée au diamètre et augmente rapidement pour les nodules de plus de 8 mm.

Certains cancers du poumon indolents qui ont souvent un aspect en  » verre dépoli  » sur la TDM présentent un indice de captation plus faible, ce qui doit être pris en considération lors de l’interprétation. Ce sont habituellement des adénocarcinomes in situ, auparavant appelés carcinomes bronchiolo-alvéolaires. Comme ils évoluent lentement, il est plus facilement acceptable d’en faire le suivi. Cependant, l’apparition d’une composante solide dans le nodule s’accompagne souvent d’une augmentation de l’activité métabolique, témoignant d’une transition vers un cancer plus agressif. Les figures 1 à 3 montrent différents exemples de nodules pulmonaires à la TEP-TDM.

La pertinence d’effectuer une TEP-TDM pour caractériser un nodule pulmonaire dépend essentiellement de la probabilité pré-test de néoplasie maligne, qui est déterminée à partir de certaines données cliniques ainsi que de l’aspect tomodensitométrique du nodule. Parmi les facteurs cliniques importants, le tabagisme, l’âge avancé et des antécédents de cancer sont tous associés à un risque plus élevé. Du point de vue de l’aspect tomodensitométrique, on s’attarde surtout à la dimension, aux contours et à la densité. À l’exception d’une minorité de nodules présentant sans équivoque des caractéristiques fortement suggestives d’une étiologie bénigne, la plupart sont de nature indéterminée et nécessitent un suivi ou un complément d’investigation, notamment avec la TEP-TDM.

La prise en charge d’un patient porteur d’un nodule pulmonaire comporte essentiellement trois stratégies possibles : si la probabilité de cancer est faible (< 5 %), il est préférable d’effectuer un suivi tomodensitométrique; à l’opposé, si la probabilité de cancer est très élevée, une résection chirurgicale est d’emblée indiquée, à moins d’un risque chirurgical prohibitif. Devant une probabilité intermédiaire (5 – 60 %), une TEP-TDM est indiquée pour préciser le diagnostic. Un algorithme d’investigation basé sur cette approche est illustré à la figure 4. Il est à noter que dans le cas de patients à risque élevé allant directement à la chirurgie, la TEP-TDM est fréquemment utilisée non pas pour caractériser la lésion primaire mais pour aider à compléter le bilan d’extension, en raison de son excellente sensibilité pour la détection des métastases ganglionnaires et à distance. Dans ce contexte, elle est particulièrement utile pour indiquer les sites de biopsies, notamment au médiastin. Le cas présenté à la figure 3 en est un exemple. En présence d’une lésion primaire de moins de 30 mm localisée en périphérie (stade IA), l’absence de captation ganglionnaire permet même d’éviter une évaluation médiastinale invasive. Les recommandations officielles concernant l’utilisation de la TEP-TDM pour l’investigation des nodules pulmonaires sont résumées au tableau 2.

Conclusion

Au cours des 20 dernières années, la TEP (devenue la TEP-TDM) au 18F-FDG s’est progressivement démarquée comme un examen particulièrement utile dans le cancer du poumon. Son utilisation judicieuse permet une prise en charge optimale des patients avec nodules pulmonaires en confirmant ou rendant moins probable la présence de cancer, en indiquant le taux d’activité métabolique des lésions, ce qui permet d’en prédire l’agressivité, et en assistant la stadification médiastinale ainsi que la détection des métastases extra-thoraciques.

 

Figure 1. Nodule hypermétabolique de 17 x 21mm au lobe supérieur gauche chez une femme de 60 ans. La pathologie a révélé qu’il s’agissait d’un carcinome épidermoïde pauvrement différencié (stade pT1N0M0).

Figure 2. Découverte d&#39;un nodule spiculé de 10mm au lobe supérieur droit chez un homme de 44 ans connu pour une Granulomatose avec polyangéite. Ce nodule est suspect à la tomodensitométrie. La TEP-TDM est négative, et le suivi tomodensitométrique sur 3 ans est non-évolutif, confirmant l’étiologie bénigne (granulome).

Figure 3. Homme de 69 ans qui présente un nodule apical droit de 14mm sur la TDM. La TEP-TDM montre un nodule hypermétabolique d’allure néoplasique (flèche rouge) et plusieur métastases ganglionnaires dont une à proximité du nodule (flèche noire). Une biopsie trans-bronchique d’un ganglion para-trachéal droit est revenue positive pour un adénocarcinome d’origine pulmonaire.

Adapté de: Truong M T et al, RadioGraphics 2014; 34:1658–1679